lundi, décembre 18, 2006

Remous autour d'un "symposium ottomaniste" à l'ULB

rétroactes: 15 décembre 2006 : SYMPOSIUM : L´Union européenne en quête d´une identité multiculturelle : l´expérience ottomane !



COLLECTIF 1971
L'Association des Arméniens Démocrates de Belgique
Les Associations des Assyriens de Belgique
L'Institut Kurde de Bruxelles
La Fondation Info-Türk

collectif1971@scarlet.be
Tél: 02-215 35 76 (Fr) - 02-230 89 30 (Néerlandais)




Mr. Philippe Vincke
Recteur de l'Université Libre de Bruxelles
ULB CP130
Avenue F.D. Roosevelt 50
1050 BRUXELLES


Monsieur le Recteur,

Nos quatre organisations issues de l’émigration politique en provenance de Turquie, sont fort choquées d'apprendre qu'à l’Université Libre de Bruxelles aura lieu le 15 décembre un symposium sur le thème "L’Union Européenne en quête d’identité multiculturelle : l’expérience ottomane!".

Ce symposium est organisé par l'Union Européenne des Turcs Démocrates d'Europe (UETD) qui n'est qu'une organisation lancée en 2004 par l’AKP, parti islamiste au pouvoir, afin d’encadrer la communauté turque en Europe selon sa ligne politique.

Avec le soutien accru du gouvernement turc, elle joue actuellement le rôle d’organisme principal de lobby turc. Ce rôle attribué à l'UETD a été confirmé par le Premier Ministre Erdogan lors d'une réunion tenue le 25 mai 2006 à Berlin.

D'ailleurs, cette organisation s'est distinguée lors de la crise de caricatures de Mahomet par la plainte qu'elle a portée en mars 2006 contre le journal allemand Die Welt.

Il n'est pas étonnant que parmi les orateurs affichés se trouvent le ministre turc d'Etat chargé des Affaires Religieuses, membre du parti islamiste au pouvoir ainsi qu'un historien français connu pour ses positions négationnistes calquées sur la position officielle turque vis-à-vis du génocide arménien.

Il faut rappeler que, à part une secrétaire d'Etat régionale, aucune personnalité politique ou académique belge n'a accepté l'invitation pour cette mascarade "politico scientifique".

Pourtant, à notre grand étonnement, l'Université Libre de Bruxelles, un des fiefs de la laïcité et de l'esprit critique qui a toujours défendu la cause juste des peuples opprimés, permet à une organisation parastatale de faire la propagande de la négation du génocide des Arméniens et Assyriens en présentant l'expérience ottomane comme une identité à imposer à l'Union Européenne en quête d'identité multiculturelle.

En tant qu'organisations défenderesses des droits de l'Homme et des peuples, nous vous demandons d'annuler l'autorisation pour ce simulacre de symposium au moins pour le respect de la mémoire des victimes du premier génocide du siècle commis pour l'Empire Ottoman et par solidarité avec les victimes de la répression du régime d’Ankara qui souffrent actuellement dans les prisons turques.

Dans l'attente d'une suite digne d’une université libre, nous vous prisons d'agréer, Monsieur le Recteur, l'expression de nos sentiments très distingués.

Bruxelles, le 13 décembre 2006


Bogos Bogosian
L'Association des Arméniens Démocrates de Belgique
aadb.asbl@hotmail.com


Nahro Beth-Kinne
Les Associations des Assyriens de Belgique
nahro.beth-kinne@scarlet.be

Derwich Ferho
L'Institut Kurde de Bruxelles
http://www.kurdishinstitute.be

Dogan Ozgüden
La Fondation Info-Türk
http://www.info-turk.be



Malaise ottoman à l'ULB

Ricardo GUTIERREZ - Philippe RENIER
Le Soir : édition du 15/12/2006 | page 14

Gros émoi à l'Université libre de Bruxelles (ULB). En cause : le symposium qui s'y tient, ce vendredi, à l'initiative de l'Union des démocrates turcs européens (UETD). Il y sera question de l'expérience ottomane en tant que modèle d'intégration multiculturelle pour l'Europe. . . Plusieurs associations d'Arméniens, Assyriens, Kurdes ainsi que des Turcs progressistes ont écrit au recteur, Philippe Vincke, choquées par cette manifestation, qui émane selon elles « d'une organisation lancée en 2004 par l'AKP, parti islamiste au pouvoir, pour encadrer la communauté turque en Europe ». L'ULB prend ses distances : « Le symposium ne correspond pas à ce qui nous avait été annoncé (. . . ). Nous avons toutes les raisons de ne pas accepter la tenue d'une telle manifestation, mais nous nous sommes finalement résolus à ne pas l'annuler. »

L'UETD revendique vingt mille adhérents en Allemagne, en Autriche et au Benelux. Son antenne belge, constituée en 2005, a notamment pour objet « la promotion des intérêts des Turcs et des Européens d'origine turque auprès des institutions publiques du royaume de Belgique et des autres Etats membres de l'Union européenne ». Son président Esref Yagcioglu conteste toute allégeance, dans le dernier numéro du mensuel Binfikir : « Nous sommes plus occupés avec le PS, le CDH et le parti libéral qu'avec l'AKP. Ceux qui désirent s'occuper avec l'AKP n'ont qu'à partir en Turquie. »

« Inacceptable »

Parmi les orateurs attendus, vendredi : le ministre turc des Affaires religieuses Mehmet Aydin et l'historien Gilles Veinstein, connu pour avoir mis en doute l'existence du génocide des Arméniens. . . « Il est inacceptable que l'ULB héberge dans ses locaux une telle manifestation avec des participants nationalistes et négationnistes », réagit Hayik Malikian, du Comité de défense de la cause arménienne.

Militant laïc de culture musulmane, Chemsi Chéref-Khan se déclare interpellé par « le fait que la Turquie, candidate à l'adhésion, ne vient pas nous proposer un débat sur le modèle de laïcité de la république kémaliste, mais plutôt un modèle ottoman basé sur le principe de la dhimmitude, qui constitue un modèle dans lequel une religion dominante tolère des religions dominées, moyennant l'obligation pour ces dernières de s'acquitter de certaines charges. On aurait aimé que l'initiative turque mette en avant le principe républicain de l'égalité entre les cultes, plutôt que le principe d'inégalité tolérée du modèle ottoman de la dhimmitude ».

Mehmet Saygin, secrétaire général de l'UETD, pose le débat sur un autre plan. . . L'Europe n'est pas un club exclusivement judéo-chrétien, dit-il, appuyant « de façon périphérique » la candidature de la Turquie à l'Union.

L'UETD contribue, dit-il, à « positiver » le statut des Turcs présents dans les pays européens et l'image de leur religion, l'islam, « victime de préjugés ». « L'islam constitue inévitablement une part importante du concept de multiculturalité » sur lequel devrait être basée l'identité européenne, dit Mehmet Saygin. « Sinon, je serai un éternel immigré. »


Pas de remous au colloque turc


Le Soir 16/12/2006

L'ULB accueillait vendredi un symposium sur le thème « l'Union européenne en quête d'identité multiculturelle : l'expérience ottomane ». Un colloque controversé : il avait été dénoncé cette semaine tant par des associations arméniennes et assyriennes que par les autorités de l'ULB. On n'a cependant noté aucune manifestation devant l'ULB.

L'ULB avait publiquement pris distance avec ce symposium jeudi, après avoir appris que le sujet initial et la liste des orateurs du colloque avaient évolué.

« Nous ne l'avons pas annulé pour ne pas créer d'incident diplomatique avec la Turquie, parce qu'un ministre turc devait être présent, a déclaré jeudi Isabelle Pollet, la porte-parole de l'ULB à l'agence Belga. Mais nous ne cautionnons pas les propos qui pourraient y être tenus. » Vendredi, le symposium semble s'être déroulé dans le calme.

« Pas de rassemblement devant les locaux »

« Je n'ai eu vent d'aucun problème, a confirmé Elise Lennertz, l'assistante du recteur de l'ULB. Il n'y a pas eu de rassemblement devant les locaux où se tenait le symposium. »

Dans une lettre adressée au recteur de l'ULB, quatre associations de minorités turques s'étaient indignées de ce que « l'Université libre de Bruxelles permette à une organisation parastatale de faire la propagande de la négation du génocide des Arméniens et Assyriens ». (b)

1 commentaire:

Anonyme a dit…

La polémique étant substantielle, peut-être est-il utile, d'un point de vue déontologique, de lire ce que les principaux concernés ont à dire là-dessus ? Pour info :

Communiqué de presse de l'UETD Brussels concernant le symposium du 15 décembre 2006


L'UETD (Union of European Turkish Democrats) Brussels a organisé, à la date du 15 décembre 2006, en la salle Dupréel de l'ULB (Université Libre de Bruxelles), un symposium intitulé « L'Union européenne en quête d'une identité multiculturelle : l'expérience ottomane » ainsi qu'une « Exposition d'archives ottomanes ».

À travers ce programme, l'UETD a voulu oeuvrer en faveur de la multiculturalité, du dialogue interreligieux et entre les peuples ainsi qu'en faveur du rapprochement entre les civilisations.

Dans le strict respect de cet objectif, c'est avec minutie que l'équipe d'orateurs de ce symposium, intégrés en raison de leurs travaux scientifiques et de leurs parcours académiques, a été constituée afin d'offrir à l'auditoire du jour de brillants exposés.

Voici les intitulés des exposés réalisés durant le symposium :

« Diversité culturelle et relations UE-Turquie » (Prof. Dr. Mehmet AYDIN)

« La diplomatie ottomane en Europe du 15e au 18e siècle » (Prof. Gilles VEINSTEIN)

« L'islam dans l'espace public européen à l'aune de la multiculturalité » (Prof. Tariq RAMADAN)

« La place et l'influence des non-musulmans dans la bureaucratie ottomane » (Prof. Dr. Kemal CICEK)

« La multiculturalité ottomane : l'exemple de Sarajevo » (Prof. Dr. Cemalettin LATIC)

La simple lecture de ces intitulés suffit pour se convaincre que l'objectif poursuivi par les orateurs de ce symposium n'était ni l'apologie ni l'infériorisation de groupes religieux ou ethniques ayant contribué à la construction historique de l'Empire ottoman, quels qu'ils soient.

Est-il chose plus naturelle, dans un cadre universitaire, que l'analyse réflexive d'expériences propres à une histoire qui a entretenu maints rapports avec l'Europe et ce durant des siècles ? Il est inacceptable que des groupuscules usant d'arguments politiques de nature discriminatoire et raciste, à mille lieues du savoir, tentent de faire pression sur les institutions universitaires.

Le symposium et l'exposition d'archives ont eu lieu comme prévu. Avec succès. Cependant, des groupuscules, mus par la volonté de provoquer l'annulation de ce programme, ont pris des initiatives tendant à faire dévier l'objectif de ce symposium et à le salir. Il est de notoriété que les groupuscules en question nourrissent à l'égard des Turcs et de la Turquie des préjugés essentialistes et hostiles.

En contradiction avec le concept même du symposium, ces groupuscules ont voulu le condamner à l'échec en le réduisant aux relations turco-arméniennes. Nous le déplorons.

Les actes du symposium feront prochainement l'objet d'un support livresque qui sera largement diffusé au sein de l'opinion publique. Ce faisant, le caractère partisan et injustement hostile de l'argumentation de ceux qui ont procédé à une aberrante diabolisation, avant même la concrétisation du symposium et sans même éprouver le besoin déontologique d'y assister, se répandra de lui-même.

Nous déplorons, au regard de l'éthique scientifique, que les penseurs qui ont participé au symposium comme orateurs aient été mis en examen par de prétendus spécialistes et faits l'objet de prises de position accusatrices prenant à partie leurs personnes. L'université est une institution qui produit de la réflexion, or la réflexion ne peut être produite dans un climat de pression et de discrimination.

Nous adressons nos remerciements à l'ULB pour avoir consenti à la réalisation, dans le respect du projet d'origine, de notre programme, en dépit de toutes les tentatives malintentionnées visant son annulation. Néanmoins, nous peinons à comprendre que la raison de ce consentement soit due à la volonté de l'ULB d'éviter un incident diplomatique entre la Belgique et la Turquie, ce qui constitue une raison politique, quand il devrait trouver son fondement dans la liberté de pensée et d'expression académiques.

L'UETD est une association civile qui œuvre au succès, au développement et à l'intégration des « Turcs Européens ». Aussi bien les thèmes qu'elle a traités que les projets qu'elle a concrétisés jusqu'à aujourd'hui fournissent des informations suffisantes sur ce qu'elle est. Établir de fantasmagoriques liens entre notre organisation et un quelconque parti politique relève du préjugé et du procès d'intention les plus simplistes.

L'UETD poursuivra sa route. Nous allons continuer à développer les perspectives de notre avenir au sein de la grande famille européenne et poursuivre la concrétisation réfléchie de nos projets, afin que la communauté turque acquière le succès, la respectabilité et l'épanouissement qu'elle mérite.


Respectueusement,


UETD Brussels
Bureau de presse

Bruxelles, le 21 décembre 2006.

(Lu sur www.uetd.be)